Légèrement abattu…

Légèrement abattu…

« Mangez cinq fruits et légumes par jour ».

Pour l’instant on peut encore les accompagner de quelque chose, d’une viande au hasard. Ca ne durera pas.

Dans la lutte contre la consommation de viande on connaissait les végétariens. Pourquoi pas… C’est bien leur droit. Ils ont trouvé des alliés étonnants : un certain nombre d’individus qui travaillent dans les abattoirs et qui jugent plaisant de torturer un animal avant de l’abattre. Il est des alliés dont on se passerait volontiers.

Il est vrai qu’Andy Warhol disait que chacun dans sa vie aurait son quart d’heure de gloire. Et ces individus ont réussi une forme de performance : ils réussissent à énerver à juste titre beaucoup de monde, et en particulier tous ceux qui s’occupent de viande : bref, aussi bien les éleveurs que les bouchers ou encore évidemment les restaurateurs ; le tort qu’ils leur causent a beau être injuste, il est réel. Dans la foulée ils dégoûteraient les gourmets qui savourent la viande mais pas forcément la torture. Déjà les Torquemada de la fourchette pointent du doigt : « Voyez à quelles abominations mène la consommation de viande ». Ben voyons…

De façon plus générale ces impeccables crétins suscitent la consternation chez tout individu bénéficiant d’un équipement standard en matière de sensibilité. Du coup pour permettre à ces individus une exposition médiatique pleinement à la hauteur de leurs mérites incontestables il ne reste plus qu’à leur souhaiter qu’un Juge en correctionnelle les fasse doucement rôtir à petit feu en attendant éventuellement un passage en prison : ils seront peut-être amenés à croiser des gentlemen un peu moins conciliants que les animaux dont ils avaient la charge.

Etrange période… Des petites frappes lobotomisées sèment la mort en grand à défaut de réussir à semer la terreur à Paris, Bruxelles, Istanbul, en Afrique, au Pakistan, … histoire de s’imaginer qu’ils défendent une grande cause. De sinistres abrutis se livrent à des actes abjects dans des abattoirs, comme ça, pour rien, juste pour le fun, « faut bien rigoler un peu, hein… ». Il n’est évidemment pas question de mettre sur le même plan ces différents actes, leurs conséquences. Mais que l’Etre humain n’ait même pas besoin de dissimuler sa bassesse derrière de vastes prétextes fumeux n’est pas forcément beaucoup plus rassurant non plus.

Alors, que faire ?

Dans son très prenant « Dans le château de Barbe-Bleue » Stirner rappelait que même la culture n’est pas toujours une garantie pour éviter que l’Homme ne sombre dans l’horreur. Il évoquait quelques monstres nazis qui accomplissaient tranquillement leurs basses œuvres dans les Camps et puis écrasaient une larme émue, le soir même, en rentrant chez eux, le temps de mettre une Messe de Schubert sur le gramophone.

Et pourtant, il ne reste que ça, le raffinement : on espère très fort qu’un terroriste serait bien incapable d’écouter le Concerto en ré m de Marcello face à la mer ; et qu’un de ces abrutis des abattoirs serait bien incapable de savourer quelque mets raffiné dans un cadre choisi… On n’en est pas tout à fait sûr, mais il ne reste que ça…

Bref, contre la barbarie, sous toutes ses formes : un concert, une expo, un bon plat, un vin fin – vite, vite : plus que jamais, en ces temps compliqués, il y a urgence !

Martin Brem – Des cours de français au coaching orthographe et expression écrite, en passant par ses activités de « plume », d’écrivain ou de chroniqueur livres  : rien de ce qui concerne le plaisir des mots ne lui est totalement étranger…